Chaque dispositif a sa propre manière de fonctionner. L'emploi du temps dépend de nombreux critères, ce qui fait qu'il n'y a pas d'emploi du temps type, et celui que l'on conçoit va évoluer tout au long de l'année. 

D'une année à l'autre, l'emploi du temps est souvent complètement différent. 

Je vous partage ma manière de procéder, qui est loin d'être la meilleure ni un exemple à suivre à la lettre ;).

1) Définir les projets d'inclusions avec les collèges

Je commence par répertorier les besoins de mes élèves : je liste les matières dans lesquelles je pense qu'ils peuvent être inclus. Je vais ensuite faire le tour des classes pour faire mes propositions d'inclusions à mes collègues. Je prends note des horaires de chaque matière pour chaque élève.

2) Harmoniser les emplois du temps, si possible...

Dans certaines écoles, les collègues acceptent, pour faciliter les inclusions, d'harmoniser les emplois du temps. Cela signifie que toute l'école fait la même matière en même temps. Par exemple, tout le monde fait maths avant la récréation, et français après. L'après-midi, tout le monde fait les autres matière, ce qui permet d'inclure beaucoup les après-midis. 

Ainsi, certaines écoles arrivent même à s'arranger pour que tous les élèves soient inclus les après-midis et que le coordonnateur ULIS puisse faire du co-enseignement ou bien du décloisonnement avec une classe. 

... Ça, c'est dans le meilleur des mondes, ce n'est pas le cas dans mon école. 

3) Faire un récapitulatif des inclusions

Sur Excel, je fais un tableau avec une page pour chaque jour.

Dans chaque page, j'insère une colonne par élève et dans chaque colonne, j'indique les horaires d'inclusions. Ce qui me permet de m'intéresser aux cases vides qui correspondent au moment où mes élèves sont dans le dispositif ULIS. 

Exemple (ici avec seulement 8 élèves en début d'année) : 

Ce qu'on peut exiger, ce qu'on peut accepter 

Cela demande une grande rigueur de la part de toute l'équipe. Chacun doit respecter ses horaires car on ne peut pas se permettre d'oublier d'envoyer un élève en inclusion ou à l'inverse, annuler une inclusion ou de décaler au dernier moment.

Ce que j'accepte : 

- Un(e) collègue peut changer ses horaires d'inclusion, être en retard ou en avance durant toute la première période, car chacun doit s'adapter à sa nouvelle classe...

- Un(e) collègue reste globalement libre de son emploi du temps et de ses horaires comme il le souhaite dans la journée, même si je négocie avec lui pour que cela m'arrange le plus possible... 

- Un changement d'horaire d'inclusion, s'il est prévenu suffisamment à l'avance (pas la veille pour le lendemain !!)

- Un décalage de 10 à 20min sur le début d'inclusion, mais l'élève va tout de même dans sa classe de référence, avec à disposition une pochette d'autonomie que je complète au cours de l'année

Ce que je n'accepte pas : 

- Qu'on me prévienne la veille ou le jour même qu'une inclusion est annulée : je ne suis pas au service de l'école, et je ne fais pas de l'occupationnel avec mes élèves, j'ai besoin moi aussi d'une certaine stabilité. Si l'enseignant décide d'annuler au dernier moment, je lui envoie tout de même l'élève. 

- J'essaie de convaincre tous mes collègues de ne pas faire le matin des matières où je peux inclure (arts, sport, musique, langue...) car sinon je me retrouve avec des inclusions en pointillés sur toute la journée et ça complique beaucoup mon organisation. J'aime avoir quasiment tous mes élèves le matin afin de travailler par groupes de niveau (attention, des élèves de même niveau d'apprentissage ne sont pas forcément dans la même classe d'inclusions puisque l'inclusion se fait selon la classe d'âge !)

- Un respect des horaires de début et de fin d'inclusion : j'envoie toujours un élève en inclusion à l'heure, même si je n'ai pas fini ce que nous sommes en train de faire, en échange, mes collègues doivent me ramener les élèves à l'heure prévue. Je ne suis pas un hall de gare où les élèves viennent et repartent quand bon leur semble. 

Quand on arrive sur un dispositif ULIS, il faut faire beaucoup de concessions au départ. On prend sur soi, on galère puis petit à petit on négocie... C'est un travail difficile et pesant, mais en étant trop "rentre dedans" on risque de braquer les collègues qui ne feront plus d'efforts. 

Pour ne pas me tromper, j'imprime l'emploi du temps des inclusions que j'accroche à la porte de la classe. 

4) Remplir les trous...

Je prends mon fichier Excel, je grise les inclusions + les prises en charge extérieures, puisque je vais m'intéresser maintenant aux temps d'apprentissages en ULIS.

Je regarde quand les élèves sont tous là en même temps et j'essaie de placer à ces moments-là des activités que nous pouvons faire en commun, avec des différenciations évidemment. 

Je conçois mes groupes de niveau (3 à 4 maximum) et je regarde quand les élèves d'un même groupe de niveau sont présents pour les faire travailler ensemble. 

Quand des élèves de groupes différents sont présents au même moment, par exemple si j'ai 1 élève de niveau GS, 1 élève de CP et 1 élève de CE1, deux solutions se présentent :

- Mes élèves sont assez autonomes, je donne du travail différent à chacun 

- Mes élèves ne sont pas du tout autonomes, mon AESH n'est pas là, j'essaie de trouver un apprentissage qui peut convenir aux trois niveaux avec différenciation (par exemple, des jeux de logique...) 

5) Prendre en compte les multiples niveaux et les besoins des élèves...

Les groupes de niveaux :  

Je répartis mes élèves dans des groupes de niveaux.

Attention :

- 1 groupe en ULIS ne correspond pas à un groupe d'élèves d'un même âge ni d'une même classe de référence. On parle de groupes de niveaux correspondant aux besoins des élèves, qui sont définis à partir des évaluations diagnostiques de début d'année. 

- Les groupes peuvent être complètement différents en fonction des matières voire des sous-domaines. Exemple : Je n'ai pas les mêmes groupes en maths et en français, et au sein même des mathématiques, j'ai des groupes différents en numération et en géométrie par exemple. 

Gérer les groupes de niveau :  

J'essaie de ne pas travailler avec plus de 3 groupes différents en même temps. Cela me permet de mettre un groupe en autonomie, un groupe avec mon AESH et un groupe avec moi. 

Parfois, j'ai 4 groupes mais c'est très rare...

Evidemment, on ULIS, on n'a jamais 4 niveaux différents... Souvent, on a de la PS au CE2. C'est pourquoi je rassemble des élèves de niveaux proches ensemble (ex : Groupe 1 :  PS-MS, Groupe 2 : GS-début CP-fin CP, Groupe 3 : CE1-CE2). 

Je vais donc différencier au sein de chaque groupe de niveau pour m'adapter à chacun.

Par exemple, on travaillera le même type d'exercice avec mes CP (par exemple de l'encodage) avec la même consigne, mais chaque enfant aura un exercice différent (pour l'encodage, l'élève de début de CP aura des syllabes, en milieu de CP des mots simples avec les premiers digraphes et en fin de CP, des mots plus complexes avec des sons de fin d'année...). 

Autre exemple : en dictée, je rassemble "fin de CP", "CE1" et "CE2". Les CP auront une dictée à trou, les CE1 auront le début de la dictée et les CE2 auront la dictée complète qui est plus longue...

En général, je fonctionne sur des créneaux de 20-30 min car le temps de concentration des élèves en ULIS est très court. Pour optimiser, je change souvent de modalités. 

Travailler en commun

J'essaie d'avoir plusieurs créneaux dans la journée avec tous les élèves, sans groupes. Cela permet de créer un esprit de groupe et j'aime voir les grands aider les petits et le petits apprendre des grands. 

La différenciation à ce moment est donc au maximum. Les objectifs et les critères de réussites sont très différents pour chaque enfant même si cela donne l'impression que tout le monde fait la même chose. 

 Varier les modalités de travail

Les élèves en ULIS ont souvent une capacité de concentration courte et peu intense. J'essaie d'alterner un maximum les modalité de travail : collectif, individuel, atelier, recherche, réinvestissement, approfondissement, révisions... 

J'essaie également d'avoir un emploi du temps très ritualisé pour que les élèves se repèrent dans le temps et prennent des habitudes.

Plus l'emploi du temps est identique chaque jour, plus on arrive à faire une grande quantité de choses car les élèves finissent pas être "programmés" et n'auront plus besoin de temps d'adaptation pour passer d'une activité à une autre. 

Voici mon emploi du temps de l'année 2019-2020, à savoir qu'il a été au point qu'à partir du mois de décembre. 

6) Les petits rituels en commun

Le matin, nous travaillons longtemps avant la récréation (de 8h30 à 10h15). Pour couper au milieu de ce long début de matinée, je fais 15 minutes de rituel. Chaque jour a son propre rituel et les enfants aiment beaucoup car c'est un moment où nous nous retrouvons tous ensemble autour d'une même activité. 

Ce créneau me permet également de travailler langage oral et production d'écrits, deux apprentissages que je trouve importants à faire tous les jours.

La phase de production d'écrits se fait parfois en différé dans la journée. 

Lundi : Quoi de neuf ?

D'abord à l'oral, les élèves racontent et j'écris au tableau les mots qu'ils auront du mal à encoder seuls pour la phase écrite. Puis les grands écrivent sur l'ardoise quelques phrases racontant leur week end en s'aidant des mots au tableau et je valide pour qu'ils recopient dans le cahier du jour. Les plus jeunes le font sous forme de dictée a l'adulte avec comme contrainte de dicter une phrase respectant les codes de l'écrit, et ils recopient seuls dans leur cahier du jour. Les tout petits tout simplement en dictée à l'adulte directement sur cahier, avec beaucoup d'aide pour produire une phrase syntaxiquement correcte et compréhensible par un lecteur inconnu.

Mardi : le mot du jour.

On formule des hypothèses pour définir le mot sous forme de carte mentale (j'écris les explications des élèves + dessins pour que les.petits suivent) sur le mot du jour. Puis un élève lit la définition, on corrige au tableau notre carte mentale. Les grands écrivent une définition du mot du jour à l'aide de cette carte mentale dans le cahier du jour, les moyens sous forme de dictée à l'adulte à recopier et les petits en dictée à l'adulte.

Jeudi : l'oeuvre artistique du jour (idée de ma binôme)

On décrit une oeuvre à l'oral (formes, couleurs...), les grands décrivent l'oeuvre à l'écrit dans le cahier du jour, les moyens ont des mots à lire et ils entourent ceux qui correspondent à l'oeuvre, puis écrivent une phrase simple à l'aide de ces mots et en prenant comme structure de référence "il y a...". Quant aux petits idem mais c'est mon AESH qui leur lit les mots et qui les redéfinit avec eux.

Enfin, le vendredi, on fait un rituel particulier en lien avec narramus.

Chaque semaine c'est pareil et parfois je change en milieu d'année. Ça me permet de travailler la production d'écrits et le langage oral de manière ritualisée et donc d'acquérir des habitudes.

7) Pour aller plus loin... Et pour le CAPPEI

Il est important aussi que chaque élève ait suffisamment d'heures dans chaque domaine en fonction de ses besoins. 

Pour correspondre au mieux aux demandes officielles (guide vert pour la maternelle, orange pour le CP et rouge pour le CE1), j'ai comptabilisé le nombre d'heures dont chaque élève à besoin dans chaque domaine.

Les après-midi, je fonctionne souvent en plan de travail et donc j'individualise ainsi les apprentissages. Chacun arrive ainsi à son "quota horaire". 

Voici un exemple, pour Aaron P, inclus en CE2 mais avec un niveau global de début de CE1 : 

Autre exemple, Christophe, inclus à 80% en CM1 :

8) Faire le deuil de l'emploi du temps parfait...

NON, ce n'est PAS POSSIBLE de respecter les quotas horaires de toutes les matières. Et quand bien même vous le feriez, cela ne conviendrait pas à vos élèves car ils ont déjà connu une scolarité en ordinaire avec des horaires "officiels" et cela n'a pas fonctionné. 

Vous ne pouvez pas vous adapter à chacun, en prenant en compte les diverses inclusions et les prises en charges extérieures. Il faudra faire des concessions et privilégier certaines choses à d'autres.

Exemple : ma collègue fait anglais en plein milieu de la matinée, pour une durée de 20min. Le temps que l'élève se prépare à partir et revienne d'inclusion, se re-mobilise et sorte ses affaires, il perd 30 voire 40min et ratera l'activité d'étude du code, que je ne peux pas déplacer à un autre moment. Je fais donc un choix : cet élève n'aura pas anglais. Ce n'est pas très bien mais entre l'étude du code et l'anglais, mon choix est vite fait. 

Je n'ai pas le pouvoir de contrôler le temps, je n'ai pas des journées à rallonge et je ne peux contrôler l'emploi du temps de mes collègues. Je fais donc... comme je peux !!